Zoom sur les 10 plus gros mensonges sur l’allaitement de C. Didierjean-Jouveau

21/12/2021

Voix d'experts - Zoom sur les 10 plus gros mensonges sur l'allaitement de C. Didierjean-Jouveau

M.Manard

A l'approche des fêtes, on se réunit, on profite en famille et souvent les conseils, remarques et recommandations sollicitées ou non vont bon train. Si celles-ci glissent sur vous comme sur les plumes d'un canard tant mieux... Par contre, parfois ces remarques déstabilisent, blessent remettent en question, alors que celles-ci ne sont pas nécessairement malveillantes, juste le fruit d'un manque d'information.

Être soi-même informé.e pour ne pas être déstabilisé.e et douter est la clé. Vous pourrez alors ou non transmettre votre savoir à votre interlocuteur mais dans tous les cas vous pourrez rester au clair dans votre ligne de conduite.

Pour illustrer les plus grosses énormités que vous pourrez entendre dans quelques soirs, ou heures, je vous propose de passer en revue les dix plus gros mensonges sur l'allaitement. Ce livre excellement écrit par Claude Didierjean-Jouveau, ex-présidente de La Leche League France (entre autres), est une mine d'information sur dix mythes à propos de l'allaitement maternel. Je suis sûre que chacune d'entre vous a dû entendre certains de ceux-ci au moins une fois.

Voici donc un aperçu de ce que vous pourrez trouver dans ce livre-pépite de Claude Didierjean-Jouveau.

Donne-lui un biberon de préparation commerciale pour nourrissons c'est pareil

A court ou à long terme, le lait maternel a des vertus inégalables. De nombreuses études montrent des bienfaits en termes de mortalité, de morbidité, d'affections gastro-intestinales, allergiques, respiratoires, de prévention de l'obésité, de diabète, de cancers, de développement du système immunitaire, neurologique, bucco-dentaire... et bien d'autres.

L'allaitement te fatigue

Avoir un enfant est fatiguant par essence. Dans de nombreuses cultures, la mère ne s'occupe de rien d'autre qu'elle et son nouveau-né pendant au moins quarante jours. De plus, le cododo et le breastsleeping sont des comportements tout à fait normaux. Nos sociétés, bien qu'en train d'évoluer, attendent souvent de la mère qu'elle reprenne ses activités (au moins ménagères) dès son retour de maternité. Si en plus, elle doit se lever la nuit pour allaiter... Oui la fatigue s'accentue, mais est-ce à cause de l'allaitement ou malgré celui-ci ?

Par ailleurs, l'ocytocine produite pendant l'allaitement offre un moment de relaxation à la mère par un relâchement physique (ralentissement du rythme cardiaque, de la respiration, baisse de tension artérielle et action antalgique). Enfin, la prolactine également libérée avec l'allaitement va favoriser un sommeil profond, offrant un sommeil plus long et de meilleure qualité aux femmes allaitantes que celles n'allaitant pas.

Enfin, l'allaitement a également de nombreux autres bénéfices pour la mère en termes de stress et de santé, à court et long terme.

C'est normal d'avoir mal en allaitant

Même si une certaine sensibilité est possible les premiers jours, la douleur en allaitant n'est pas normale. Quelles que soient les causes de ces douleurs il y a généralement des solutions lorsqu'on est bien accompagnée. Voir aussi ici.

Tu n'as pas assez de lait / Ton lait n'est pas (ou plus) nourrissant

Hormis des situations cliniques particulières (problème de glande mammaire, trouble hormonal, intervention chirurgicale) le manque de lait est extrêmement rare. Il est également possible d'observer une baisse de lactation lors de dépressions sévères, de fièvre importante, d'hémorragie, d'anémie, d'hypothyroïdie non traitée, de contraception avec oestrogènes, ... . Cependant, toutes causes confondues, la manque réel de lait ne concernerait que 5% des femmes. La plupart du temps, cette sensation de manquer de lait est liée à des soucis dans la conduite de l'allaitement ou à de fausses alertes.

Enfin, concernant la qualité nutritive du lait, retenez que même une femme en situation de malnutrition produira un lait dont les nutriments sont stables et tout à fait satisfaisants. Même si des conditions de famine entrainent une baisse ou un arrêt de production, la valeur nutritive restera homogène.

Allaiter c'est naturel

Ça ce n'est pas tout à fait faux mais c'est aussi culturel. En effet, l'allaitement ne fait plus partie de nos normes sociales. Même si il recommence à être "normalisé", l'allaitement qui dure plus que quelques semaines ou mois reste peu fréquent dans nos sociétés, ne permettant pas aux jeunes parents d'avoir un modèle, une norme autre que le biberon.

Concernant l'hygiène de vie, allaiter n'est pas censé empêcher de vivre pleinement. Alors oui, une bonne hygiène de vie est à conseiller... Qu'on allaite ou non, cependant, même en cas "d'écart", l'allaitement reste souvent bénéfique.

Tu exclus le papa

Même sans nourrir son enfant, le père peut tout à fait s'impliquer auprès de bébé, notamment via l'allaitement. En effet, l'attitude du père est décisive pour la mise en place et le maintien de l'allaitement. Informer est une priorité pour que les pères puissent trouver leur place dans cette aventure lactée.

Inutile d'allaiter si peu de temps

Chaque goutte de lait maternel est bonne à prendre. L'une des premières raisons du sevrage est la reprise de l'activité professionnelle. Or, différentes options sont envisageables. D'une part, il est parfois possible de prolonger son congé. D'autre part, il est également possible de travailler et d'allaiter si c'est un souhait des parents. Enfin, parmi les raisons qui écourtent (voire empêchent) l'allaitement, est la croyance qu'il faut rester chez soi. Cette idée est totalement fausse et tient souvent de la crainte d'allaiter en public. Cependant, avec un peu d'entrainement et des vêtements adaptés il est tout à fait possible d'allaiter dans toutes les circonstances.

Tu as de la fièvre, tu dois stopper l'allaitement

Dans la plupart des cas, lorsque la mère est malade, il est conseillé d'interrompre l'allaitement alors que cela n'est pas du tout nécessaire, bien au contraire. De plus, il est généralement possible d'obtenir des médicaments compatibles avec l'allaitement.

Si tu n'allaites pas c'est que tu n'es pas une bonne mère

Phrase souvent entendue ou reprochée aux pro-allaitement. Cependant, cela est tout à fait faux. Une mère donnant le biberon peut tout à fait être aussi adéquate qu'une mère donnant le sein. L'établissement de la relation entre une mère et son enfant dépend de nombreux facteurs. Néanmoins, l'allaitement au sein faciliterait l'établissement de cette relation par des aides hormonales, la proximité physique, la réactivité, le peau à peau...

Donc non, allaiter ou non ne fait pas de la mère une bonne ou une mauvaise mère. L'allaitement va simplement permettre de servir de vecteur, de facilitateur dans la relation mère-enfant.

L'allaitement c'est bien mais seulement les premiers mois... Après c'est inutile/néfaste

Très répandue, cette croyance s'entend même chez des professionnels de santé alors qu'elle est totalement fausse. En effet, même après trois ou six mois, le lait maternel reste d'excellente qualité, et permet d'optimiser l'état de santé de l'enfant, même à l'âge adulte. L'allaitement long ou non écourté, n'est pas néfaste pour le développement cognitif (intellectuel) ou psychologique (voir aussi ici).

Conclusion

Cet ouvrage de Claude Didierjean-Jouveau est une mine d'or informative. Extrêmement accessible et avec de nombreuses références, il se dévore très facilement même pour les cerveaux fatigués de jeunes parents. Je ne propose ici qu'un maigre aperçu et vous encourage très vivement à vous le procurer ici.

Pour en revenir aux périodes de fêtes de famille, quels que soient vos choix, ce sont les vôtres.

Voici mes quelques idées pour se prémunir d'une altercation familiale (utilisable aussi en dehors du réveillon) :

Se mettre d'accord avec le coparent à l'avance semble indispensable afin de pouvoir rester unis et se soutenir mutuellement lorsque les choix parentaux sont remis en question. Même en cas de désaccord, s'accorder sur le fait que les sujets de discorde sont discutés dans l'intimité et à têtes reposées.
Selon votre énergie et votre humeur, n'hésitez pas à informer votre entourage, avec cet article, les recommandations officielles, d'autres articles,...
Détournez l'attention en changeant brusquement de sujet : « Tiens au fait comment va ta voisine dont le chien est si bizarre ? ».
Ignorez : « Je peux avoir le plat de pommes de terre s'il te plait ? »
Ironisez : « Oooooooh miiiiinnce ! Prépare-lui un vin chaud ! Pauvre enfant, je lui donne du lait alors que c'est la fête... »
Démontrez de façon simple et courte : « Vache et humains sont des mammifères, la vache nourris le veau, je nourris mon enfant »
Coupez court et fermement la conversation : « Tu as pu éduquer tes enfants comme il t'a plu, j'en fais de même. Le papa et moi sommes en accord et nos méthodes ne concernent que nous, merci de les respecter ».
Rassurez : « J'entends tes craintes, mais rassure-toi, je suis bien informée, nous savons exactement ce que nous faisons. Je ne manquerai pas de venir te demander si j'ai besoin d'aide ». (même si ce n'est pas toujours le cas).
N'hésitez pas à vous isoler au calme, à mettre bébé en portage et à donner le sein à volonté. Car oui, bébé avec cette effervescence risque d'être particulièrement demandeur et c'est bien normal.

Alors laissez parler et profitez du moment!

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